Guides illustrés Michelin des champs de batailles Ypres et les batailles d'Ypres 1914-1918 1919 - Ypres - C22*

Michelin
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Descriptif

Dès 1917 et donc avant la fin de la guerre, André Michelin lance une nouvelle collection qui connaît immédiatement un grand succès commercial (le premier guide Michelin était, lui, né en 1900). Plus de trente volumes (consacrés à toutes les parties du front) vont paraître avec des traductions en anglais, en italien et même en allemand. Ainsi se confirme l’intuition précoce des dirigeants de la firme de pneumatiques que, très vite, les champs de bataille allaient devenir des « centres de pèlerinage » modernes. Très loin d’être de simples guides touristiques, ces ouvrages veulent entretenir la mémoire d’un conflit « total », destructeur et traumatisant, inscrire celui-ci dans l’Histoire et le souvenir des conflits anciens, tout en suscitant une exaltation patriotique à propos de l’héroïsme des soldats et de la population locale. « Un guide, un panorama, une histoire », tel était le slogan publicitaire évocateur. Les bénéfices espérés seraient de plus reversés aux œuvres travaillant à la « repopulation » de la France (en luttant contre la dénatalité).

Le guide consacré à Ypres est sans doute le plus bel exemple de cette ambition. Véritable lieu de fixation de la guerre dans les Flandres, le saillant d’Ypres fit l’objet de combats acharnés, d’abord à l’automne 1914 et au printemps 1915 (offensives allemandes), puis en 1917-1918 où les offensives alliées et particulièrement anglo-saxonnes allaient graver à jamais dans les mémoires les noms de Langemarck, Passchendaele ou du mont Kemmel. L’artillerie et les trains blindés allemands, de leur côté, réduisirent en cendres Ypres et ses édifices médiévaux uniques, suscitant l’indignation de l’opinion. À des conditions de combats éprouvantes dans les brouillards, la boue et l’eau omniprésentes s’ajoutèrent les premières expérimentations de gaz de combat (avec la tristement fameuse « ypérite »), dont les nuages verts terrifièrent une première fois les soldats en avril 1915. Les Flandres et Ypres ont été un exemple illustrant tous les aspects de cette « culture de guerre » et de la « brutalisation » du conflit qui connurent alors leur apogée.

Utilisant les collections photographiques de l’armée, faisant appel au public, mobilisant la totalité des équipes (la parution des guides classiques fut retardée), attachant un soin particulier à la réalisation des cartes retraçant précisément l’évolution des hostilités, Michelin mettait tout en œuvre pour réaliser un ouvrage pratique (en commençant par recenser simplement les possibilités d’hébergement et de déplacement là où la reconstruction venait de débuter) et construire un « monument » éditorial, ce que le guide sur Ypres illustre bien. Il fallait en particulier, grâce au travail éditorial et à une publicité intense, éviter toute concurrence étrangère (les Baedeker « boches ») ou nationale (les guides « Diamant » de Hachette).

Si tous les guides étaient dédiés à la mémoire des « ouvriers et employés des usines Michelin morts glorieusement pour la patrie », des milliers de familles françaises, britanniques ou allemandes (c’est devant Ypres que périt le poète alsacien Ernst Stadler) vinrent, curieuses ou recueillies, essayer de découvrir ce qui n’avait été que des noms abstraits dans des lettres, communiqués ou journaux. Or comme l’avaient bien vu les initiateurs de la collection, seuls les guides pouvaient « transfigurer » un paysage d’autant plus terne que l’intensité des combats avait anéanti maisons, châteaux, villages et villes. L’émotion ne pouvait naître que des comparaisons multiples faites entre les photos reproduites d’avant-guerre et les ruines du temps présent. Mais le récit et les descriptions détaillés permettaient alors de substituer à l’émotion immédiate une réflexion, et finalement un souvenir incarné dans de « nouveaux » lieux de mémoire.

On estime à un million et demi d’exemplaires les guides vendus, succès éditorial certes, mais qui fut une opération financière « blanche » tant les investissements avaient été importants. Outre la concurrence, la volonté des anciens combattants de se passer de tout intermédiaire, Michelin avait peut-être aussi un peu surestimé le succès du tourisme des champs de bataille dans une France épuisée, rêvant de retrouver la « Belle époque ».

Aujourd’hui, et alors qu’en dehors des mémoriaux la reconstruction a effacé les traces les plus visibles du conflit, les guides sont précieux pour n’importe quel historien, passionné ou curieux, afin de retrouver certains sites (en particulier grâce aux photos) ou retracer certains événements. Mais ces guides sont évidemment devenus des objets historiques en eux-mêmes, témoignant de l’ampleur du traumatisme subi (nécessité de faire le deuil des « disparus ») et du désir d’alors de comprendre à la fois globalement et précisément les événements qui venaient de bouleverser paysages, vies et nations. Ils témoignent aussi d’une société prise entre un patriotisme honnissant la « barbarie » germanique et un pacifisme voulant conjurer la perspective d’un nouveau conflit, à travers la visite instructive des lieux des combats.

Si la mémoire française de la Première Guerre mondiale reste encore très vive et a donc suscité la publication de nouveaux ouvrages, la lecture des « guides illustrés », et en particulier de celui d’Ypres (on trouvera également, bien entendu, dans la collection que possède la BNU deux volumes très précieux consacrés à « l’Alsace et les combats des Vosges ») permet, loin d’un esprit de commémoration trop figé, une plongée dans les réalités concrètes et la culture de guerre de la société française d’alors.

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